Les pires conditions. Tout le monde gigote, beaucoup grimacent, les autres survivent.
La piste officielle est coincée entre deux halles, et ceinturée de barrières vauban. Les roulettes bouclent en vrac ou en grappe.
La piste est une histoire de culs :
Les corps bataillent mais pas avec l’objectif — peu. La faute aux barrières qui maintiennent à bonne distance. La bonne distance n’est jamais la bonne décision. Il convient d’être trop près, trop loin, mal placé voire chahuté pour déclencher.
À défaut, se rabattre sur les traits de lumière ou les courbes des corps est une possibilité.
La piste officieuse est située sur l’esplanade qui longe les halles. Les looks, les poses, les cours improvisés — tout se passe là.
Pas de barrière. Jamais la bonne distance. D’abord planqué sur le banc de touche, puis calé sur le bord de la piste, parfois planté au milieu. Jamais le bon endroit. Attendre, déclencher, cumuler les erreurs, espérer que certaines seront des accidents heureux.
Il flotte parmi les rollers, navigue entre les groupes, creuse sa voie aléatoire dont il adapte la trajectoire au gré des obstacles. Un cruiser.
Rouler, s’arrêter, siroter une douceur à la paille, repartir, répéter. Dîner, aussi. Puis repartir, répéter.
La lumière du jour fond dans celle des lampes à sodium et des néons. Seules les étoiles glissantes signalent l’obscurité naissante.
Des flous, des filets de mouvement, des sous-expositions, des sur-expositions. Les pires conditions s’aggravent.
Au milieu de la piste. Avec les traine-tard, les infatigables, les encore-un-dernier-tour.
Et puis s’en vont.