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Le vernis est écaillé, décollé par les intempéries. La rouille grignote la ferraille des accoudoirs et du dossier — salit les vêtements quand on s’y installe. L’assise est inconfortable, le dossier trop court et mal incliné pour trouver une position de repos.
Il a été acheté à bas prix dans un grand magasin de bricolage, quand la vente en ligne n’existait pas encore. Depuis, il a été brossé, poncé, vernis, repeint, réparé, avant d’être laissé en l’état. Un état changeant, qui se dégrade.
Il est encore là. Il ne demande rien — il ne parle pas. Il est rustique, faussement d’époque d’une époque impossible à dater. Neuf, il avait l’air vieux. Vieux, il fait pièce rapportée.
Il est coincé entre la porte d’entrée qui était une porte de garage et la porte du garage qui n’existait pas encore quand les occupants ont emménagé. Ils ont repeint les façades, ajouté un étage, un garage, une allée de graviers, une terrasse puis l’ont posé là pour ne plus jamais le déplacer. Ils ont laissé le temps faire ce qu’il fait de mieux — abîmer.
Les rares matins d’hiver où la douceur rappelle le printemps, c’est le seul endroit où on se sent bien dans cette maison. Dehors. Le vrombissement des voitures empruntant la départementale au loin parvient jusqu’au jardin. Le chant des oiseaux perce l’épais branchage des arbres avoisinants. Le mélange des sons ambiants gomme les acouphènes constants dans les oreilles. Ça fait du bien.
Joyeux Noël triste avec tes vieux, ma puce. Love U.
Pourquoi ce sont toujours les plus vieux amis qui trouvent les mots justes pour décrire une situation ?
Parce qu’ils ne s’embarrassent pas des convenances. Tel un vieux banc.
